Décryptage de la Sécurité Incendie des IGH : les quatre réponses d'un pompier

Décryptage de la Sécurité Incendie des IGH : les quatre réponses d'un pompier

20/04/2018 par Knauf

Il y a les immeubles de grande hauteur soumis à la réglementation des IGH et ceux de 4ème famille qui ne le sont pas. Pourtant, lors de la conception architecturale, les points à prendre en compte devraient être identiques, selon Dominique Parisse*, ancien Chef d’Etat-Major de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris et actuellement Conseiller en Stratégie du Groupe Efectis.

Sécurité incendie : la réglementation la plus performante pour tous les IGH ?

Avant de parler IGH, vous souhaitez évoquer le cas des immeubles de 4ème famille. Pouvez-vous nous expliquer ?

Dominique Parisse : En effet, il faut d’abord s’entendre sur la définition même d’un immeuble de grande hauteur. Aujourd’hui en France, selon les textes en vigueur, est considéré comme IGH tout immeuble (hors immeuble d’habitation) de hauteur supérieure à 28 mètres.

Pourquoi 28 mètres ? Parce que c’est tout simplement la hauteur maximale moyenne des échelles aériennes des sapeurs-pompiers. Concernant les immeubles d’habitation dépassant cette hauteur, vous avez 2 catégories : ceux compris entre 28 et 50 m. qui sont assujettis aux dispositions relatives aux immeubles de 4ème famille et ceux dont la hauteur dépasse 50 m. qui sont inclus dans la réglementation relative aux IGH.

Pourquoi j’insiste sur ce point ? Parce qu’en France la réglementation concernant les IGH est sévère et efficace : en particulier, les dispositifs concourant à la sécurité incendie y sont nombreux et redondés. De façon générale, les immeubles concernés (ceux construits après la promulgation du règlement) sont donc bien réalisés et bien entretenus.

Mais le problème majeur réside dans ces immeubles de 4ème famille, dont la réglementation est beaucoup moins contraignante et les dispositifs concourant à la sécurité non redondés.

Un exemple : dans les IGH, il faut 2 escaliers encloisonnés, une commission de sécurité, un service de sécurité et des vérifications périodiques. Alors que, pour l’autre catégorie, un seul escalier encloisonné suffit et il n’y a aucune contrainte sur les autres points que je viens de mentionner. De mon expérience de sapeur-pompier, j’ai souvent été confronté à des problèmes liés au manque d’entretien de ces immeubles comme des colonnes sèches bouchées ou des dispositifs de désenfumage qui ne fonctionnent pas. Tout cela parce qu’il n’y a aucun contrôle périodique.

 

Quels sont alors les points importants à prendre en compte lors de la conception ou la rénovation d’un IGH ?

D.P. : Concernant les immeubles soumis à la réglementation relative aux IGH, il faut veiller à respecter scrupuleusement les exigences réglementaires. Concernant les immeubles de 4ème famille, les architectes devraient adopter dans leurs réflexions certains points de sécurité obligatoires dans les IGH comme ceux portant sur les matériaux, les dégagements, l’alarme, les accès pour les moyens des secours, etc.

Ce n’est pas une obligation mais plutôt du bon sens. Avec un 2ème escalier, par exemple, on perd certes un peu de place mais on augmente le niveau de sécurité intrinsèque du bâtiment et donc des occupants.

 

Un incendie comme celui de Londres pourrait-il se reproduire en France ?

D.P. : Tout d’abord, soyons clairs : les règles qui définissent un IGH sont variables selon les pays. Aussi, toute comparaison d’un pays à un autre est très aléatoire. Dans le cas de Londres, l’immeuble mesurait 67,3 m. de haut. Il était donc classé comme IGH par la réglementation de Grande Bretagne et aurait également été classé IGH en France.

Dans ce sinistre particulièrement meurtrier, l’une des problématiques majeures a été le comportement au feu de la façade et, en particulier, les raisons de la propagation de ce feu de l’extérieur vers l’intérieur, au fur et à mesure de son développement. Une des hypothèses souvent évoquée a été l’implantation des fenêtres qui, associée au système d’isolation par l’extérieur de la façade, a vraisemblablement permis au feu de rentrer très vite dans les étages. C’est, à mon avis, une piste sur laquelle il faudrait travailler, en particulier lors de la conception de ce type d’immeuble.

Sans oublier qu’il n’y avait aussi qu’un seul escalier, de petite largeur, ce qui n’a facilité ni le travail des secours ni les sauvetages, mises en sécurité et évacuations. Ce sont tous ces points clés qui peuvent faire la différence en cas de sinistre.

Classée IGH en France, cette conception ne serait pas possible, et la façade ferait l’objet d’un visa de façade obligatoire délivré par Efectis ou le CSTB, statuant sur la conformité réglementaire.

 

Si on parlait matériaux : ne pourrait-on pas imposer des produits de classe A1 dans les IGH ?

D.P. : Pour moi, il faut d’abord raisonner système et non pas produit. C’est le système qui doit répondre, dans son intégralité, aux exigences réglementaires. Aussi, se limiter au seul classement A1 d’un matériau n’est pas suffisant. Les architectes doivent s’assurer que les systèmes choisis répondent bien aux exigences et que leur mise en place est faite conformément aux essais et aux recommandations. Et, dans le cas de l’incendie de la Tour Grenfell de Londres, ce sont bien les systèmes qui sont en cause.


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* Ancien officier de l’Armée française, Dominique Parisse a fait les deux tiers de sa carrière au sein de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, qu’il a quitté, en 2008, comme Chef d’état-major. Après avoir été Conseiller technique en normalisation et réglementations feu auprès des industries françaises et européennes des plastiques, il est aujourd’hui Conseiller en Stratégie du Groupe Efectis, acteur majeur dans le domaine de la science du feu, de la sécurité incendie et du secours d’urgence.